Sous la mer, les épaves

Lundi 28 novembre 2016, à la machine à café pour la pause de 9h

 

M: Salut Alex.

A: Salut Michel, t’as passé un bon week end ?

M: Ouais bien, tranquille, et toi, t’es allé au ski ? T’es tout bronzé.

A: Non, ce week end je suis allé plonger.

M: Fin Novembre ? Mais t’es allé en mer rouge ou quoi ?

A: Non en méditerranée, à Bormes les Mimosas.

M: Houla, vous avez dû vous cailler là bas.

A: Ben non ça va en fait, on a eu un temps de malade! Il faisait grand beau, on a eu du bol, ils se sont pris des tempêtes l’avant veille, mais nous on a eu un grand ciel bleu.Regardes un peu le temps qu’on a eu dès le samedi matin:

20161126_084823samedi matin devant le club Aventure Bleue

Perso j’avais peur de me peler, alors j’avais pris des sous couches de skis, des pulls et des coupes vent à ne plus savoir qu’en faire, mais finalement je n’en ai pas eu besoin de rien. En plus l’eau était super bonne, entre 16 et 17° de 0 à 60 m.

M: 60 m? Mais vous descendez à combien en plongée?

A: Bah ça dépend, en général on est 2 ou 3 plongeurs par palanquée !

M: …

A: Bon ok. Ben à l’air on peut descendre jusqu’à 60 m, moi j’avais jamais fait plus de 45 m. Et là samedi matin, bim! 58 m pour aller faire le Togo, un cargo au large de Cavalaire. C’était ma première profonde en mer, j’avais un petit pincement au coeur avant de plonger. J’étais avec un gars, Xavier, qui était vachement plus rodé que moi pour ce genre de plongée. Du coup je lui ai dit d’imprimer le rythme à la descente car il faut pas perdre de temps à descendre si tu veux profiter un peu au fond. Alors il est parti comme une balle, sauf que moi j’étais pas prêt, j’avais pas encore mon masque, je me speedai pour mettre mon détendeur et j’ai essayé de descendre super vite pour le rejoindre. Tu parles, j’étais tellement stressé que j’arrivai pas à descendre de 2m. Je me suis dit “écoute mon petit bonhomme, tu refais surface, tu te calmes et tu descends zen”. Là j’ai pu le retrouver (il a dû trouver le temps long) et voilà qu’on tombe pendant presque 60m en suivant un fil qui nous amène directement sur l’épave. C’est l’épave préférée de Nath, tu sais le connard des projets US, mais honnêtement la visibilité était trop juste pour bien en profiter, on devait voir à 5m. Bref en arrivant sur le pont, j’ai eu comme un souci avec mon masque, genre “tiens il rétrécit” … Et là j’ai réalisé que c’était pas le masque, c’était la narcose! Ma première!

M: La … ?

A: Narcose. L’ivresse des profondeurs. En fait, sans vouloir te la jouer Wikipédia, en profondeur tu as un excès d’azote dans le corps pouvant entraîner des troubles de comportement.

M: Tain mais c’est super dangereux la plongée!

A: Non, on fait gaffe, et puis on est formé pour gérer ses cas là. Sur cette plongée, on s’est fait un petit contrôle justement en arrivant au pont, moi, mon masque s’était arrêté de rétrécir, Xavier m’a dit que lui ça allait, et on a continué. Pas longtemps, juste le temps de voir 2 barracudas, un mérou et de longer la coque du bateau. Mais au bout de 15 min il fallait remonter.

M: Quoi ? Vous n’avez plongé que 15 min?

A: Non, 35, parce qu’arrivé vers les 6m de profondeur on avait 20 minutes de palier répartis entre 6 et 3m. 20 minutes de palier pour 15 min au fond, c’est ça les joies des plongées profondes.

M: Et du coup vous avez tous fait cette épave?

A: (merci Michel d’avoir posé la question) Et bien non, figure toi qu’il y a une palanquée qui n’a trouvé que du sable au fond.

M: Ben je croyais qu’il y avait un fil qui menait directement à l’épave et qu’il fallait bêtement le suivre …

A: Ben ouais Michel, je pense que tu aurais pu gérer l’orientation sur cette plongée… Je crois qu’ils ont perdu de vue le fil à 10m de fond, et avec le manque de visi et le courant (faible mais quand même), ben ils n’ont jamais trouvé l’épave. Tiens regarde, j’ai pris une photo souvenir pour eux:

20161126_120243La plongée de Romain, mon binôme,
à qui je n’adresse plus la paroles depuis ce jour là …

 

A: Après je te rassure, ils ont profité de l’épave à leur façon …

20161126_114948Zoé et Laurent faisant l’épave du Togo …

20161126_173848Romain qui aura fini par faire le Togo le samedi en nocturne en plus!

 

M: Et après vous vous êtes éclaté le bide au resto comme à chaque fois ?

A: Non, pas cette fois. Ce weekend là, on partait à la journée en bateau, ça permettait d’aller sur des sites un peu plus éloignés qu’on n’aurait pas forcément pu faire autrement. Du coup s’était sandwich sur le bateau, dans une petite crique au soleil. Top.

M: Et l’aprem, vous avez fait une plongée plus tranquille?

A: Bof, 40m quand même. On a fait l’Espingole, un contre torpilleur, juste à côté d’où on mangeait. C’était marrant, c’était une épave toute en longueur, rien à voir avec celle du matin. Là on a vu un peu plus de trucs, des congres, une belle grosse langouste, des galathées, un big mérou. En remontant, on se prend presque 20 minutes de palier ! D’habitude à 40m, on fait quoi, 5 min de palier … mais avec la plongée du matin on a pris cher! Le soir on a pris un apéro avec un autre club de grenoble avec qui on plongeait: le Subatomic. Ils avaient 2 guitaristes, ça a mis une bonne ambiance et ça change des concerts de canettes vides.

M: Et samedi soir, vous avez vu le match ?

A: Le match ?

M: Ben ouais France – Nouvelle Zélande ?

A: …

M: Au rugby …

A: Ah ouais, après le repas, on a regardé le match. Enfin les autres on regardé le match … Je piquai du nez régulièrement j’ai du voir une pénalité, tout le reste je pionçai. Y a même l’action ou la France était pas loin de mettre un essai, les paupières se ferment et se réouvrent et pan, j’ai raté un essai transformé des néo zélandais … J’ai comme l’impression que ma première 60 m’a bien flingué.

M: Tain ils ont bien joué les français, le score ne reflète pas du tout le déroulement du match, c’est dommage parc…

A: On s’en fout, parce que le dimanche, on repart, à l’est de Porquerolles, pour faire le Donator ET le Grec, dans la même journée.

20161127_091046En route pour PorquerOLLES

On arrive sur le 1er site, y avait déjà un bateau, et en cette saison, y a si peu de monde que c’est pas la peine de s’embêter à être plusieurs sur un même site (c’est d’ailleurs la seule fois du week end qu’on a vu un autre bateau de plongeurs). Alors on change de programme et on commence par le Grec. C’est une épave de cargo à 48m, je suis avec un procureur pour plonger, et un des gus de la palanquée ‘sable’ de la veille. Eric, le mec du club de Bormes (Aventure Bleue) nous fait le briefing et explique que la proue est détachée et se trouve à environ 50 mètres du reste du bateau et que pour ceux qui ont déjà fait plusieurs fois le Grec ça peut être un objectif sympa, à condition de ne pas se perdre. Ok, mais moi j’ai jamais fait le Grec, donc la proue, ça sera pour un autre jour. Cette fois-ci la visibilité était bien meilleure, on voyait à 10-15 mètres. On arrive sur une hélice big mama, au fond: mostelles, bernard l’hermite, galathées, crevettes, etc. Et puis au bout d’un moment je vois mon guide de palanquée ‘sable’ qui commence à partir dans le sable, justement. “Oh merde, il va chercher la proue ce con”. Je le sens pas cette affaire, je remonte d’une dizaine de mètres histoire de pas vider mon bloc pour rien. Et on palme, on palme, on palme et on ne voit rien. Et tout à coup ! Paf, la proue! Il l’a trouvé (il s’est bien rattrapé par rapport à la veille mais ça ne fera ni chaud ni froid ces compagnons de galère). La proue était plutôt sympa et on a vu un énorme mérou dedans. Après, faut déjà remonter et faire sa petite vingtaine de minute de palier (le fil rouge du week end). Par contre pour ces paliers on avait de la compagnie: des petites méduses qui nous ont aidé à passer le temps.

Le midi casse croûte encore sur le bateau et go pour la dernière plongée du week end. Déjà.

20161127_113122Casse croute oklm

Le Donator! Je voulais absolument le faire avec Romain, mon binôme de niveau 2 et 3. Tu sais l’année dernière on avait tenté le coup de bluff pour faire cette épave et le DP, Vincent, s’y était opposé (surtout il n’était pas tombé dans le panneau). Et ben, cette année, Vincent s’est encore mis en opposition: il n’était pas sûr de pouvoir passer les oreilles, du coup le DP à changer les palanquées et c’est Romain et moi qui avons morflé 🙁 Bon, au moins Romain augmentait ses chances de faire 3 épaves dans le week end. En descendant, on arrive direct sur l’hélice du bateau, un truc qui fait au moins 3m de haut! Énorme! Quand je pense qu’il y en a qui ne l’ont pas vu au printemps … Bref la visibilité était encore top, il y avait des lumières et des ambiances vraiment jolies, comme le matin, des gorgones de partout. On est rentré un peu dedans, on a croisé des mérous dans les cales. Par contre le palier là, était folklo: arrivé dans les 10 mètres je commence à tousser. Et puis ça ne s’arrête pas: quinte de toux, je ne sais pas pourquoi! Mais du coup je galérai comme un âne pour rester à 3m, avec ma toux et mon bloque presque vide, je sentai que j’étais attiré par la surface alors je me suis accroché 15 minutes à un autre plongeur qui me servait de lest. Un peu space pour une fin de dernière plongée.

M: Ben ça avait l’air bien dit moi comme weekend.

A: Terrible, pas loin d’être un des meilleurs weekend que j’ai fait depuis que je suis au club et pourtant, je n’ai fait que des supers weekend.

20161127_151628Snif, c’est fini 🙁

 

M: Bon, c’est pas tout mais faut peut être qu’on aille bosser un peu ce matin, non ?

A: Ben il est 11h40, on va peut être aller manger plutôt. Cantine?

M: Go !

 

Nota Bene: Cette histoire est une fiction, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite. Aucun plongeur n’a, à ce soir, raté le Togo quand un bout amène jusqu’à l’épave. De plus il a été prouvé par les plus grands chercheurs (1m95 au garrot) que la mer méditerranéenne ne peut atteindre ses températures fin novembre.